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>L’Actualité, no. Vol: 25 No: 17
1 novembre 2000, p. 27

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>L’Actualité, no. Vol: 25 No: 17
1 novembre 2000, p. 27

Témoignage

De la mafia la politique
“Un jour, une Cadillac va se pointer devant le bureau de la circonscription et ses occupants vont mitrailler…” Voici l’incroyable saga d’un tueur à gages devenu organisateur du Bloc québécois!

Vastel, Michel

>Un extrait du livre de Réal Simard

>Pendant la campagne électorale fédérale de 1993, Réal Simard – ancien tueur de la mafia montréalaise devenu informateur de police et jouissant d’une liberté conditionnelle – a travaillé comme organisateur pour la candidate du Bloc québécois dans la circonscription de Verdun, en banlieue de Montréal. En même temps, la Gendarmerie royale du Canada et la Drug Enforcement Administration des États-Unis l’utilisaient comme agent double pour piéger des trafiquants québécois de cocaïne!

>Le livre de Réal Simard, Trahisons (Québec Amérique), est l’extraordinaire confession d’un ancien tueur à la solde des Cotroni, cette famille montréalaise qui faisait la loi dans le monde du crime organisé dans les années 70. Arrêté pour meurtre en 1983, condamné à la prison à vie, Simard est devenu délateur en 1986, a obtenu une nouvelle identité et a été remis en liberté en 1990.

>Depuis 10 ans, sa vie est une incroyable succession de fuites rocambolesques, sous l’oeil indifférent des policiers et des Services correctionnels du Canada. Simard, qui a aujourd’hui 49 ans, a beau se trouver des emplois, il est invariablement reconnu par de vieilles connaissances du milieu ou dénoncé à ses employeurs par d’anciens policiers. À chaque fois, le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal doit lui fournir, à grands frais, une nouvelle identité et une autre adresse secrète. Son histoire illustre à quel point le Canada est mal organisé pour aider d’anciens criminels devenus informateurs de police à se réhabiliter.

>L’extrait du livre de Réal Simard que L’actualité publie en primeur se situe en 1993. L’auteur, qui s’appelle alors Michel Roselli, a rencontré l’avocat Richard Holden. Député de Westmount et en rupture de ban avec le Parti Égalité, Me Holden siège alors à l’Assemblée nationale sous la bannière du Parti québécois. Puisant dans son budget de député, il tente d’aider Roselli, dont il connaît l’identité, en lui confiant de petites tâches d’organisation politique…

>Nous sommes en juin 1993, et des élections fédérales doivent être déclenchées d’un mois à l’autre. Conseiller politique du député Holden, je recevais mon chèque de paye de l’Assemblée nationale. Je ne me sentais pas tellement qualifié pour faire ce travail et je mettais les bouchées doubles, lisant tout ce que je pouvais sur le sujet.

>Quand les élections furent déclenchées, il fut décidé dans les hautes sphères du Parti québécois que les députés péquistes prêteraient leur personnel aux candidats du Bloc le temps de la campagne. Nous désirions faire d’une pierre deux coups: Me Holden savait très bien qu’en tant que député du Parti québécois il ne se ferait pas réélire dans Westmount; nous étions donc à la recherche d’une circonscription, et Verdun semblait toute désignée. Le hasard faisant bien les choses, le Bloc était quant à lui à la recherche d’un directeur de campagne pour sa candidate dans lacirconscription de Verdun, Kim Beaudoin.

>Nous désirions former une équipe qui, ainsi constituée, pourrait travailler non seulement à l’élection de Mme Beaudoin à la Chambre des communes, mais aussi à l’élection de Richard Holden à l’Assemblée nationale.

>Nous avons trouvé un bureau de campagne situé rue Wellington, dans un ancien magasin d’articles de peinture et de décoration, et formé une équipe qui avait beaucoup d’expérience, acquise lors d’élections passées.

l’ouverture de ce bureau, je dois dire que j’étais assez fier. Les citoyens de la circonscription, venus en assez grand nombre, étaient heureux de se retrouver aux côtés de vedettes du PQ comme Jean Campeau, Guy Chevrette, Louise Harel, André Boulerice, André Boisclair, et du député du Bloc québécois Nick Leblanc.

>Nous avions loué un autobus et nous visitions le quartier et quelques usines. Nous étions tous convaincus que nous gagnerions ces élections fédérales. Il y avait une dynamique incroyable et un esprit d’équipe qui faisait chaud au coeur.

>Entre-temps, un ami proche de ma famille vint me voir et me demanda de sortir “prendre une marche”. Il me dit alors qu’il connaissait un gars travaillant pour une grosse organisation, laquelle désirait acheter 100 kilos de cocaïne. Je lui ai souri en lui disant que si le gars était vraiment collé sur une “grosse organisation”, comme il le prétendait, il n’avait pas besoin de nous pour trouver 100 kilos. Il me répondit que le gars désirait tâter de nouveaux marchés, et que c’était du sérieux.

>L’homme en question avait fait son argent dans le trafic de cigarettes. Il croyait, à tort, que j’avais conservé des contacts avec certains membres du milieu.

>Je lui ai répondu que je contacterais quelqu’un mais que ça devait être quelque chose de très rapide parce que je n’étais pas plus intéressé que ça. J’appelai alors le sergent Gilles Rivest de la Gendarmerie royale, un policier que j’avais connu lorsque je collaborais avec la police. Il accepta de me revoir, et notre rencontre eut lieu dans un stationnement de l’est de Montréal, non loin des bureaux de la Brigade antigang, Place Versailles.

>Après lui avoir expliqué l’affaire, je lui dis que j’accepterais seulement de présenter un agent double à l’ancien trafiquant de cigarettes. La GRC devrait s’organiser avec le reste.

>Il m’est impossible ici de divulguer toute la teneur de l’enquête, qui s’est échelonnée sur plusieurs mois. Une policière, au péril de sa vie, travailla à mes côtés. Pour les besoins de l’enquête, il avait été convenu qu’elle se ferait passer pour ma compagne et que son père serait un gros trafiquant de drogue très proche du cartel de Cali, en Colombie. Ce “père” vivait en Floride mais possédait aussi une résidence à Candiac, occupée par sa fille. Ma “compagne” dit au trafiquant qu’elle accepterait de contacter son père pour rendre la transaction possible, moyennant un pourcentage pour elle et pour moi. Je devais ensuite me retirer de la transaction le plus tôt possible.

>Une rencontre eut donc lieu au restaurant Le Cherrier, rue Saint-Denis, à Montréal. Les policiers étaient postés en face dans un autobus et filmaient la scène. Le trafiquant, un dénommé Peter, était un grand blond qui ressemblait un peu à l’acteur Robert Redford. Il avait une belle prestance et semblait surtout très crédible dans sa façon d’aborder la situation: il sentait le trafiquant de drogues à plein nez même si, selon nos renseignements, il s’agissait plutôt d’un novice. Lors de notre conversation, je lui fis accepter l’idée de rencontrer ma compagne, la policière. Les policiers m’avaient demandé d’exiger 25 000 dollars d’acompte avant même de commencer à parler de la transaction, afin qu’il nous montre sa bonne foi.

>Pour Peter, l’argent n’était pas un problème. Une nouvelle rencontre dans le stationnement d’un McDonald’s non loin des bureaux de la GRC à Montréal fut donc organisée pour la remise de l’argent. Entre-temps, je continuais de travailler le jour à la campagne de Kim Beaudoin dans Verdun. Les policiers désiraient de toute façon que je me retire du dossier une fois le versement de 25 000 dollars effectué. J’étais bien d’accord avec eux: j’avais hâte de retourner à mon travail d’organisateur politique et d’oublier cette double vie.

>Il avait été convenu que les rencontres entre le père de ma compagne et le trafiquant auraient lieu en Floride. L’entrapment étant en effet défendu au Canada, la GRC avait décidé de transférer le dossier à la Drug Enforcement Administration (DEA). Le trafiquant devrait partir une journée avant nous, afin d’être déjà sur place à notre arrivée. Je me suis assuré de ne quitter Montréal que pour deux jours. Les élections arrivaient, et j’étais débordé de travail. Je ne m’attendais vraiment pas à être autant impliqué dans cette histoire.

>Les sondages nous donnaient gagnants dans Verdun. Je constatais avec plaisir que plusieurs choix s’offraient à moi. Je pourrais continuer comme attaché politique à Ottawa ou encore comme secrétaire de circonscription dans Verdun, une fois Mme Beaudoin élue. Par contre, je pouvais aussi reprendre mes activités de conseiller de Richard Holden et attendre les élections provinciales.

>Un des policiers de la Communauté urbaine de Montréal avec qui j’avais eu à travailler lors de l’entrapment aux États-Unis révéla les confidences que je lui avais faites sur mon travail en politique à Jacques Duchesneau, à l’époque chef de la Brigade antigang et devenu depuis directeur du SPCUM. Duchesneau demanda à deux policiers de l’antigang de me rencontrer et de me demander de démissionner. Le sergent Barbeau, accompagné d’un autre policier, vint me voir à Verdun dans un restaurant non loin du bureau de campagne de la candidate du Bloc et me transmit la requête de son supérieur.

>”Pour qui se prend Duchesneau? demandai-je. C’est lui qui remplace le Parrain ou quoi? Il me demande de lâcher ma job. Mais il est fou! Allez le voir et dites-lui que je ne lâche pas la campagne électorale deux semaines avant les élections. Ce serait le démantèlement de toute l’organisation et la perte de la circonscription pour Kim Beaudoin. Après les élections, je considérerai sa requête, mais pas avant.”

>Duchesneau n’est pas homme à se faire dire non. Il a donc pris les grands moyens pour que je laisse tomber. Il a appelé Jean Royer, conseiller du président du Parti québécois, Jacques Parizeau, et lui a révélé que le Michel qui travaillait pour Richard Holden et qui était directeur de campagne dans la circonscription de Verdun pour le Bloc n’était nul autre que Réal Simard, ancien tueur à gages de la mafia devenu informateur pour la police. Comment Jacques Parizeau a-t-il appris que j’avais même collaboré à une enquête de la GRC du temps où j’étais employé au Parti québécois? Je l’ignore, car cela devait évidemment rester confidentiel. Toujours est-il que M. Parizeau, parlant de mon cas à Me Holden, prétendit que j’espionnais le parti pour la GRC. Cela me fit beaucoup de peine.

>Royer communiqua avec Bob Dufour, conseiller du chef du Bloc, Lucien Bouchard, et directeur de la campagne électorale. On appela Kim Beaudoin pour lui demander de me congédier. Elle refusa, disant que mon passé ne la regardait pas et qu’elle avait des élections à gagner. Les sondages nous donnaient gagnants par une bonne majorité et cela s’annonçait comme une première pour Verdun.

>Devant le refus de Kim Beaudoin de me congédier, on sortit alors l’artillerie lourde. Le capitaine McGinnis, un ami personnel de Duchesneau, prit les choses en main. Il envoya deux policiers chercher la candidate à son bureau, et une rencontre eut lieu au siège de la Brigade antigang, au troisième étage de la Place Versailles.

>Les sergents détectives Barbeau et Gagnon assistaient à la rencontre. McGinnis dit à Mme Beaudoin que mon véritable nom était Réal Simard, que j’étais un ancien tueur, que j’étais recherché par la mafia et que, d’un jour à l’autre, si elle persistait à me garder à son service, le sang allait couler dans Verdun par sa faute. Le policier dit qu’un jour une Cadillac se pointerait devant le bureau de campagne du Bloc et que ses occupants mitrailleraient d’innocentes victimes!

>Kim Beaudoin ne pouvait pas savoir que le milieu ne me cherchait pas et que j’avais beaucoup plus de problèmes avec la police qu’avec la mafia. Elle ne pouvait pas savoir que mon apparence avait tellement changé que même ma famille avait de la difficulté à me reconnaître. Elle ne pouvait pas non plus savoir que la mafia, si elle m’avait retrouvé, n’aurait pas agi comme McGinnis le prétendait. Finalement, elle ne pouvait pas savoir ni même deviner tous les intérêts et toutes les manigances que cachait cette demande. La vraie question, en fait, était de savoir qui avait intérêt à aller se chercher du capital politique parmi tous les acteurs de ce drame, car c’était bien là un drame

>On venait encore une fois de saboter ma vie, de la piétiner comme si je n’étais qu’un vieux sac de chips qui, vidé de ses miettes, est écrasé et jeté à la poubelle. Pour la police, c’est tout ce que j’étais, et pourtant j’étais encore trop visible, trop présent. Ça les dérangeait et je devais disparaître.

>En mai 1994, un rapport des Services correctionnels du Canada sur ces événements a précisé: “Le directeur du Service de police de la CUM, Jacques Duchesneau, reconnaît que l’intervention policière a été improvisée et mal évaluée.” Le SPCUM a défrayé l’attribution d’une nouvelle identité. Depuis, Réal Simard a dû changer trois autres fois d’identité et, le 25 décembre 1999, il a décidé de “disparaître”… La police ne sait plus où il se trouve.

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Dimitri Soudas
Deputy Press Secretary/Attaché de presse adjoint
Quebec Advisor/Conseiller Québec
Office of the Prime Minister/Cabinet du Premier ministre

80 Wellington Street, Suite 120 80, rue Wellington, Bureau 120
Ottawa (Ontario)
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